Fondation Bemberg - Visite thématique

« Débarquer à Manhattan, c'est escalader un train en marche ; rentrer en Europe, se précipiter sur un wagon dételé. » <^p> Georges Bemberg est de la race des grands voyageurs : issu d'une famille allemande établie en Argentine dans les années 1850, il est né à Buenos Aires en 1915. Parlant couramment le français, l'anglais et l'espagnol, il a, dès son plus jeune âge, partagé son existence entre l'Argentine et la France. Plus tard, c'est New York qui deviendra sa ville d'élection. Planiste et compositeur de talent, il fut l'élève de Nadia Boulanger et songea un moment à faire une carrière de musicien, mais c'est finalement la littérature qu'il choisit. Diplômé de Harvard et familier des cercles littéraires de la Nouvelle Angleterre où il fréquente les plus grands comme John Dos Passos, Saint Exupéry ou, plus inattendu, Jean-Paul Sartre, Georges Bemberg écrit aux États-Unis différents ouvrages en anglais, notamment des pièces de théâtre qui sont saluées par la critique new-yorkaise. En France, encouragé par Roger Caillois et Saint-John Perse, il a publié plusieurs ouvrages comme L'innocence américaine ou le mythe d'Abel, (essai, Ed. du Sagittaire, Paris, 1948), Fils du Pays (nouvelles, Paul Morihien Editeur, Paris, 1948), Quatre Mains (nouvelles, La Table Ronde, Paris, 1953) ou Mal du Sud (poèmes en prose, Patrice Thierry & Champavert, Toulouse, 1994). Dans Journal Atlantique 1959-1999 qu'il qualifie lui-même, non sans malice, d'« anti-blog » Georges Bemberg nous livre avec vivacité, pénétration - et une infinie pudeur qui est sa suprême élégance -, la chronique alerte et vivifiante d'un monde qui, à la veille d'un nouveau millénaire, se découvre mondial et s'interroge sur son héritage et son devenir. Qui, mieux que cet amateur d'art cosmopolite et raffiné de la lignée des Paul Morand et des Julien Green, pouvait témoigner de cette mutation de notre monde entre le siècle qui l'a vu naître et celui avec lequel il « se réconcilie comme avec un ami qu'on n'a plus très envie de voir » ? Aujourd'hui encore, à près de 95 ans, « l'énigmatique M. Bemberg » comme l'appellent les médias car il ne donne jamais d'interview, se partage entre Paris, New York et Buenos Aires. Collectionneur et mécène, il a légué dans la plus grande discrétion à la fondation qui porte son nom deux cents ouvres postérieures à l'impressionnisme, deux cents toiles modernes, cent cinquante bronzes et environ cinq cents objets d'art et pièces de mobilier ainsi que des dizaines de livres rares. Ce fonds exceptionnel qui va du Portrait de jeune homme de Véronèse au dessin Le Nu d'Egon Schiele, en passant par une aquarelle et une huile sur bois de Raoul Dufy, est exposé en L'Hôtel d'Assézat de Toulouse, le plus beau monument Renaissance de la ville rose. Il vient encore de s'enrichir d'une aiguière en émail polychrome signée Jean Court (entre 1555 et 1575), et du Plat aux jacinthes, chef d'ouvre de l'art Ottoman (1590) provenant de la vente aux enchères Yves Saint-Laurent.